Aragnouet est une commune de montagne très étendue, réunion de trois villages (Aragnouet,
Le Plan et Eget) et de plusieurs hameaux (Moudang, Fabian, Meyabat) entre 1791 et
1801 sur le territoire qu’on appelait autrefois le Val d’Eget. Malgré l’altitude
variant de 1000 à 1300 mètres pour les habitations, ce territoire froid et hostile
est peuplé et fréquenté depuis l’âge de bronze (tumulus, sépultures, hache, monnaie…).
L’étymologie d’Aragnouet vient du gascon aranhon (= prunellier, buisson épineux),
même si parfois on peut lire l’explication erronée de « petit Aragon ».
Panneau des sentiers, devant la mairie.
Aragnouet-village ne présente pas d’intérêt particulier, si ce n’est les promenades
dans la nature alentour. Le surnom des habitants est « Ets aouarques » qui sont des
sandales de cuir de vache, un peu retournées, portées par les montagnards. Parmi
les épisodes marquants de l’histoire d’Aragnouet, signalons que le 14 septembre 1708,
Aragnouet fut attaqué par une armée de 400 Miquelets arrivés par le port de Bielsa.
Les Miquelets étaient des bandits se déplaçant en bande, vivant de vols, notamment
de bétail comme les brebis ou les mulets qu'ils dérobaient par centaines et même
par milliers. En 1846, une avalanche en face du village emporta pas moins de 15000
arbres.
L’église est dédiée à Saint-Pierre-aux-Liens (comme Eget et Fabian) dont la fête
se célèbre le 1er août. L’édifice a été reconstruit en 1842, puis restauré en 1977.
Bénitiers anciens. Cette église servit d’abri aux Espagnols lors de l’exode de 1937-38.
Le hameau de Fabian, appelé autrefois Castets, est devenu le centre administratif
de la commune avec la mairie et l’école. C’est aussi le point de départ de la route
des lacs du Néouvielle.
La mairie d’Aragnouet est située au hameau de Fabian.
L’école publique des « Aouarques » a été construite sur l’emplacement d’une ancienne
chapelle qui servait aussi de salle de classe.
La chapelle moderne de Fabian date de 1950-60. L’ancienne chapelle a été détruite
pour élargir la route. Statues de l’ancienne chapelle à l’intérieur.
Vivre à Aragnouet, c’est accepter des conditions hivernales difficiles et des terrains
pentus.
Le quartier du Plan est le plus élevé d’Aragnouet. Le décor, à la bifurcation de
la route d’Espagne et de celle conduisant à Piau-Engaly, est grandiose.
Curieuse chapelle-lavoir du Plan d’Aragnouet. Ancienne chapelle qu’on date probablement
du XIXe siècle. Cloche toujours présente.
Monument aux morts du Plan, en forme d’Arc-de-Triomphe.
Stèle 1939-45, en hommage aux évadés qui traversèrent les Pyrénées.
Mais le centre d’intérêt principal du Plan est sa chapelle dite « des Templiers ».
Cette image est si célèbre qu’elle symbolise souvent à elle-seule le département
des Hautes-Pyrénées. Au fond avec un peu de neige le massif du Campbielh (3173 m.)
et tout à fait à droite en haut, le Pic Méchant (2930 m.)
Cette chapelle de l’Assomption est dite à tort « chapelle des Templiers ». Elle devrait
plutôt porter le nom des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem. Elle fut construite
au XIIe siècle, un hôpital aujourd'hui détruit s'y trouvait accolé, les Hospitaliers
pouvaient ainsi héberger les voyageurs franchissant les cols, le clocher-mur semble
être le seul vestige de cet ancien hôpital. La chapelle a été classée au titre des
Monuments historiques en 1939 et le clocher-mur en 1952. L'ensemble a été classé
à l'UNESCO au titre des Chemins de Saint-Jacques en 1998.
L’intérieur de la chapelle est très dépouillé. Le mobilier ancien avait été récupéré
pour le presbytère de Vielle-Aure. Le centre d’intérêt principal est sa Vierge noire,
qui est en réalité une copie. L’originale (photo ci-contre) est détenue dans un lieu
tenu secret. Cette Vierge avait en effet été volée en 1986 mais heureusement retrouvée
lors d’une vente aux enchères de l’Hôtel Drouot à Paris en 1988. Les vierges noires,
très vénérées en vallée d’Aure, avaient été probablement rapportées de Palestine
par les Hospitaliers. On sort la Vierge originale pour la fête du Plan, chaque 15
août.
Restes de peintures murales du XIVe siècle.
Le clocher à quatre baies porte le millésime 1876, date d’une probable restauration.
Eget-Cité est une création « ex nihilo » d’un petit bourg dédié à l’électricité entre
1910 et 1923, année de la mise en service de la centrale. Villas pour les ouvriers,
restaurant et même petite école composaient l’ensemble. Les conduites forcées, au
nombre de sept, descendent de la montagne d’une hauteur de 750 mètres. Elles récupèrent
la force des 17 millions de mètres cubes d’eau contenus dans le lac de L’Oule, créé
en 1922 puis rehaussé en 1950. Grâce à cette usine, les habitants d’Aragnouet n’ont
pas payé l’électricité pendant plusieurs années ! Ce temps est révolu…
Plus ancien, Eget-village surplombe la route. Dans le contrebas, on devine Eget-cité.
Eget semble plat vu du ciel, mais ce n’est pas le cas.
Lavoir de plein air à Eget. Les habitants d’Eget étaient surnommés « Ets cullérès
de Get » (= les fabricants de cuillères). Fabriquer des cuillères et des fourchettes
de bois était une occupation importante des habitants durant l’hiver où aucun travail
agricole n’était possible. Ils écoulaient alors leur production en parcourant tous
les villages de la vallée. Les autres habitants louaient leurs services en Espagne
comme bûcheron ou pour la fabrication d’huile.
L’église d’Eget et le départ des conduites forcées de l’usine. Histoire vraie : en
1852, le curé d’Eget se jeta par la fenêtre du presbytère, haute de sept mètres et
se tua. La fenêtre fut immédiatement murée. L’évêque de Tarbes-Lourdes écrivit aux
consuls d’Eget : « Mettez en terre l’infortuné, à l’entrée de l’église, sous le porche,
afin que les paroissiens allant à la messe lui passent sur le corps ». Le suicide,
surtout des hommes d’église, n’était pas bien vu en ce temps là…
Une chapelle isolée, en bord de route au hameau de Meyabat (anciennement Miéjabat),
attire l’œil.
La légende dit que les Miquelets, bandits de grand chemin espagnols, volèrent la
statue de la vierge d’Eget et l’emportèrent. Au fur et à mesure de leur retrait,
la statue devenait de plus en plus lourde et les voleurs l’abandonnèrent ici. Les
habitants d’Eget décidèrent de construire une petite chapelle en ce lieu. Construite
vers 1660, elle a été reconstruite en 1881 sous l’impulsion des bergers du secteur.
Grâce aux rentrées d’argent de la production d’électricité, la commune d’Aragnouet
disposait des fonds nécessaires pour construire une station de ski. Piau-Engaly ouvre
en 1980 avec quatre télésièges et onze téléskis. L'architecture d'ensemble, moderne
mais bien intégrée dans le paysage, est une réussite.
Le tunnel Aragnouet-Bielsa
En 1976, le tunnel Aragnouet-Bielsa, long de trois kilomètres et reliant la France
à l’Espagne ouvre au public. Les travaux avaient commencé en 1967. Cela désenclava
la vallée d’Aragnouet, mais depuis de nombreux véhicules l’empruntent, emportant
avec eux eur lot de nuisances.
Rond-point symbolique à Saint-Lary, à l’entrée de la vallée d’Aragnouet.
Dès que l’on s’éloigne de la route principale, la nature devient omniprésente avec
ses cascades, ses forêts, ses lacs. Aragnouet possède plusieurs pics approchant ou
dépassant les 3000 mètres : Néouvielle, Campbielh, Troumouse…
De nombreuses randonnées sont à effectuer (Port-vieux, granges du Moudang, etc…),
mais la plus fréquentée est celle de la réserve du massif du Néouvielle avec ses
lacs.
Le territoire communal d’Aragnouet abrite deux lacs artificiels (Orédon et Cap-de-long)
qui alimentent la centrale électrique de Pragnères, dans la vallée de Gavarnie. Orédon
est le premier barrage des Pyrénées (1882) avec une capacité de 7 millions de mètres
cubes et un barrage de 60 mètres de haut. Son objectif premier était de réguler la
Neste. Les deux maisons abritaient les ingénieurs et la cantine des ouvriers.
Cap-de-Long est le plus grand lac artificiel des Hautes-Pyrénées avec une capacité
de 68 millions de mètres cubes. Créé en 1909, il a été agrandi en 1953 après des
travaux titanesques. Aumar et Aubert, qui complètent cet ensemble avec de nombreuses
galeries souterraines, sont situés sur la commune de Vielle-Aure.
Les célèbres lacets des Edelweiss, menant aux lacs d’Orédon et de Cap-de-Long.
Panneaux peints de la chapelle du Plan, exposés aujourd’hui dans l’église d’Eget.
Au mois de novembre 2016, lors de l'enlèvement aux fins de restauration, du retable
de l'église d'Eget (photo ci-contre), de magnifiques fresques du XIIIe siècle ont
été mises à jour. Du coup, on n’a pas replacé le retable pour laisser les visiteurs
admirer les fresques !
Les belles églises peintes de la vallée d’Aure et du Louron sont souvent fermées
à clé, mais des visites de découverte, gratuites, sont organisées par l’association
Patrimoine Aure-Louron (voir leur site internet pour les dates de visites).